1x01 - Capitaine Nemo (3/17) - Meilleurs Amis

La neige crisse sous les pas de Markus alors qu'il se dirige, sacoche à l'épaule, vers un imposant bâtiment de briques beige foncé, parés de fenêtres très allongées sur la hauteur et curieusement arrondies en leur sommet. L'étudiant, vêtu d'un dégradé du bleu marine au noir de sa veste à ses bottines en passant par ses jeans, ne s'accorde le loisir de trottiner que lorsqu'il atteint les quelques marches qui mènent jusqu'à l'entrée, recouvertes on ne sait trop pourquoi d'une couche moins épaisse de matière glissante.

Un autre jeune homme, de son âge, l'attend sous l'une des trois arches romanes qu'arbore la façade de l'édifice, probablement pour se donner l'illusion d'être protégé du froid, puisqu'il ne vente pas vraiment.

De même taille à peu près que son camarade qui le rejoint, aux cheveux châtains et aux yeux bleus semblables aux siens, l'inconnu serre son manteau contre lui et danse d'un pied sur l'autre dans ses baskets grises à motifs rouges. Il affiche néanmoins un large sourire lorsqu'il aperçoit Markus.

— Hey, Marko ! T'en as mis du temps.

Mark fait rouler ses yeux dans leur orbite.

— Ouais, désolé, Rob. Dure reprise. J'avais pas pensé à la neige…

— T'es sûr que t'es né à Chicago ?

Comme raisonné par le père face à sa fille au matin, les Hivers sont toujours plutôt enneigés, dans les environs.

— T'es sûr que t'es né tout court ?

Répartie minable mais suffisante pour les deux amis. Le dénommé Robert lui assène un coup de poing amical à l'épaule puis, ramassant son sac qu'il avait posé à ses pieds, lui emboîte le pas vers l'intérieur.

Une fois entrés, ils présentent, presque d'un même geste, leurs RFSD^[1] au scanner de l'entrée, sous l'œil de lynx de la documentaliste de garde. La jeune femme blonde à frange leur jette un bref coup d'œil par-dessus ses petites lunettes rectangulaires, et leur accorde même un vague sourire, avant de retourner à son écran. Les deux compères empruntent ensuite en silence et sans tarder l'escalier principal du bâtiment.

Ils font bientôt leur entrée dans une vaste salle d'étude rectangulaire, aux murs couverts d'étagères elles-mêmes couvertes de livres, évidemment sous verre et sous clé. Une large allée traverse la pièce dans sa longueur, bordée de chaque côté d'un alignement de grandes tables intelligentes, autour desquelles attendent de nombreuses chaises. Quelques groupes de personnes, plus ou moins conséquents, occupent déjà une partie de l'espace, mais les deux garçons n'ont pas non plus à chercher pour trouver une place.

Ils décident, sans avoir à se parler, de s'installer au bout d'une table, côté étagères. Le plus discrètement possible, ils retirent leurs manteaux pour les placer sur le dossier de leur chaise, déposent leurs sacs par terre, puis appliquent chacun le même badge numérique qu'auparavant sur la surface réactive. Quelques tapotis suffisent ensuite à faire apparaître devant eux des pages et des pages d'annotations, souvent accompagnées de schémas techniques.

Il est difficile de croire que des notes de cours aussi extensives nécessitent encore l'appui de volumes complémentaires, et pourtant. Certes, les deux amis pourraient y avoir accès depuis le confort de leur domicile, mais il y a quelque chose de rituel au fait de se rendre à la bibliothèque pour étudier, qui permet une meilleure concentration.

[1] RFSD : Radio Frequency Secure Data : croisement entre la carte SD et la puce RFID (/!\ concept fictif)

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