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Affichage des articles du novembre, 2015

Transport commun

Ma passagère actuelle s'appelle Dana. Elle a 23 ans, les yeux gris-vert, et de courts cheveux blonds. Assise au fond de ma barque, son baluchon à côté d'elle, elle profite du paysage, un léger sourire flottant sur ses lèvres. Pour ma part debout à l'avant de l'embarcation, je nous fais avancer à lents et amples coups de rame. Je n'ai jamais deux fois le même passager. Et non, ce n'est pas dû à la piètre qualité de mon service, au contraire ; c'est simplement une facétie de ce que j'offre. Toujours est-il que, par conséquent, je me plais à scruter chaque voyageur avec une certaine intensité. La jeune femme semble apprécier la fine couche de brume blanche en suspension quelques millimètres au-dessus de la surface de l'eau. Si je ne l'en avais pas dissuadée d'un hochement de tête à la négative, elle aurait sans doute même oser effleurer le liquide noir et opaque sur lequel nous voguons tranquillement, d'ordinaire peu encourageant. Même l&#

Aller simple

Je vais enfin m'offrir ce voyage dont j'ai toujours rêvé. J'ai un peu pris cette décision sur un coup de tête, voire beaucoup, mais qu'importe. Si je ne suis pas spécialement impulsive par nature, quand on a une idée qui nous revient sans cesse à l'esprit, on finit par en arriver à un point où on ne peut plus l'ignorer, il faut se lancer. Je n'ai pas l'impression d'avoir eu le choix. Ça s'est juste imposé à moi. Il fallait que j'entreprenne cette aventure, aucune autre option n'était plus possible. J'ai prévu de laisser une lettre à mon frère. C'est rétro, mais on a un côté vieux jeu, tous les deux. Il m'a bien envoyé une lettre manuscrite pour me faire part de son mariage. Je serais d'ailleurs déçue de rater ça, comme je lui en parle justement dans ma propre missive. Ce n'est cependant même pas certain que je ne sois effectivement pas là le jour J, de toute façon, donc rien n'est perdu. J'ai fait mon sac, j

Point de Non-Retour

- Tu as faim ? La voix de sa fiancée sort David de ses pensées. Il décolle son front de la vitre et retire son menton de son poing, s'arrachant à sa contemplation passive du ruissellement des gouttes de pluie sur le verre trempé. Il observe la conductrice de la voiture pendant quelques secondes, comme pondérant sa réponse, ou peut-être même carrément la question qu'on lui pose : - Non, ça va, merci, il finit par pratiquement murmurer. Jill se permet un coup d'œil de côté, pour s'assurer qu'il sourit. C'est pâle, mais elle s'en contentera. - Tu es sûr ? Il n'y a pas à manger à la maison, donc autant s'arrêter maintenant, elle se permet d'insister. - C'est comme tu veux… Le sourire du jeune homme s'élargit légèrement, et la rouquine se détend un peu. Le silence retombe alors dans le véhicule, et les yeux de David retournent machinalement vers l'eau que la vitesse fait filer sur la carrosserie. Tout à cette observation, il n'a