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Affichage des articles du septembre, 2014

Le monde est une île

Le monde est une île. La première fois que tu m'as dit ça, je n'étais pas sûre de t'avoir bien entendu. Je me souviens avoir froncé les sourcils et t'avoir demandé de répéter. C'était notre premier rendez-vous, nous marchions dans la rue, à la vitesse d'escargots, sans destination ni horaire, juste à discuter, divaguer, à apprendre à nous connaître. Tu aurais pu laisser tomber à ce moment-là. Tu aurais pu saisir la perche qui n'en était pas une et retirer ce que tu venais de dire, de peur de passer pour un imbécile dès le début, ou à l'inverse parce que tu ne savais pas encore si moi j'en valais la peine. Mais tu as insisté. Le monde est une île. Alors j'ai souri, parce que je me suis doutée que c'était une théorie que tu avais dû mettre un certain temps à échafauder, et que je n'avais donc pas le droit de me moquer. J'étais également flattée que tu la partages avec moi, surtout alors que je ne la comprenais pas. Bon, d'accord

Exil

- Ce sera à quel nom, Monsieur ? - … Alors que la guichetière me demande mon patronyme en souriant, je suis frappé par le symbolisme de cette étape, souligné par le fait que c'est la première fois que je la franchis seul. Je me remémore soudain avec une étonnante clarté tous mes changements de nom, ainsi que la première personne à qui j'ai dû donner chacun de ces alias. Dans mon plus ancien souvenir sur le sujet, j'avais à peu près six ans, et je voyageais avec un grand groupe de gens d'âges divers ; dans le dernier, datant d'il y a à peine plus de dix-huit mois, je n'étais qu'avec ma mère adoptive, de seulement vingt ans mon aînée. Entre ces deux instants ancrés dans ma mémoire, petit à petit, les rangs de mes accompagnateurs se sont réduits. Les plus jeunes ont disparus les premiers, puis les plus vieux, en masse. Ensuite, lorsqu'il n'est plus resté que les individus d'âge moyen, si la fréquence des disparitions n'a jamais vraiment dimin