1x12 - Grandes respirations (4/16) - Menace
La durée de rétablissement prescrite pour des côtes cassées est de six semaines. Ayant parcouru un tiers du chemin, Aleksander est donc toujours assigné à résidence, même si l'enquête générée par l'attaque de son laboratoire a pris fin ce matin. DG sous les verrous, l'ingénieur ne court a priori plus aucun danger de leur part, mais son état de santé reste un obstacle à sa reprise d'activité, selon les régulations en vigueur.
Comme n'importe quel témoin ou victime, il n'a pas été tenu au courant des progrès de l'investigation de son agression. Pas par des voies officielles, en tous cas. Mais en l'occurrence, sa petite souris potentielle, le fantôme d'adolescente dans la machine, ne l'a pas prévenu non plus que la conclusion de l'affaire approchait. À l'instar de son fils aîné et sa petite amie, il a donc été très surpris en l'apprenant dans le journal, un peu plus tôt dans la journée.
Sa première pensée a été pour la jeune fille et tous les risques qu'elle a pris pour obtenir ce résultat, à l'encontre de ses recommandations. L'idée l'a effleuré un instant qu'elle n'y était pour rien et que les enquêteurs avaient réussi à démasquer DG sans son aide, mais elle l'a vite détrompé lorsqu'il l'a interrogée. Il semblerait qu'elle ne l'ait pas tenu au courant pour ne pas l'inquiéter, tout simplement, même si c'est difficile à affirmer, puisqu'elle communique encore majoritairement par l'intermédiaire d'images animées silencieuses. (Selon Jena, la jeune femme rousse en larmes signifierait "à l'aide", et serait issue d'un très vieux film comme sa sœur aime en regarder.)
Une fois rassuré sur son sort, Alek s'est tout de même mis à échanger avec son élève, du mieux qu'ils peuvent, sur les moyens qu'elle a employés pour arriver à ses fins. Il tient à en savoir le plus possible sur la façon dont elle s'y est prise pour discrètement amener les agents au bon endroit, afin d'être en mesure de l'aider à couvrir ses traces au besoin, même avec un peu de retard. Avoir fait tomber DG s'avérerait en effet une victoire bien amère si elle entraînait parallèlement la découverte de la situation de la jeune fille par les autorités compétentes.
Le père de famille est dans le salon, assis dans un fauteuil, une tablette sur les genoux et une tasse de thé dans une main. Le canal de conversation sécurisé qu'il a mis en place pour Caroline est affiché, et diverses images animées transmises par la jeune fille s'intercalent à des messages cohérents écrits par son mentor. Tout à coup, sans qu'il n'ait rien demandé, une nouvelle fenêtre surgit de nulle part.
Vous vous croyez malin ? apparaît sur le petit écran, en lettres blanches sur fond noir.
Qui êtes-vous ? demande tout naturellement Alek, qui avait d'abord cru qu'il s'agissait d'une mauvaise manipulation de la jeune fille, avant de voir la phrase apparaître.
Pour tous ses progrès, elle n'a jusqu'ici jamais été capable de plus construit que l'énigme avec laquelle elle a verrouillé les fichiers compromettants qu'elle lui a fait parvenir.
Vous n'allez pas vous en tirer comme ça, continue l'intrus, de manière aussi menaçante que de simples mots sur un écran peuvent l'être.
Qui êtes-vous ? réitère l'ingénieur, n'appréciant pas l'insinuation.
Vous savez qui je suis. Et vous savez ce que vous avez fait. L'ennui, c'est que je le sais aussi, l'inconnu poursuit son discours abscons.
Je ne sais pas qui vous êtes, mais j'ai la conscience tranquille. Je n'ai rien fait de mal, annonce le père de famille sans même hésiter.
Aussi techniquement illégale la protection de la jeune Caroline soit-elle, personne ne lui fera jamais croire que c'est la mauvaise chose à faire.
Le bien et le mal sont des concepts dépassés. Vous allez payer pour ce que vous avez fait, son interlocuteur non identifié continue dans ses menaces.
Je n'ai rien fait du tout. Vous faites erreur sur la personne, il tente, espérant conduire l'anonyme à se démasquer.
Vous êtes le Professeur Aleksander Nathanael Quanto, de Chicago. Votre frère, Sam, travaille dans la Police locale, aux homicides. Votre fils aîné, Markus, est étudiant en médecine. Caesar et Mae, vos petits derniers, sont au lycée Walter Payton. Vous pensez toujours que je fais erreur sur la personne ? lui répond malheureusement le mystérieux corbeau.
Qui que vous soyez, si vous osez toucher à ma famille, vous allez le regretter, met en garde Alek, serrant les mâchoires, incapable de se contenir.
Ah oui ? Comment ? Vous allez détruire le travail de toute ma vie une nouvelle fois ? raille l'autre, se dévoilant un peu.
Je ne sais même pas qui vous êtes, affirme à nouveau l'ingénieur, sans mentir, puisqu'il ne connaît effectivement personne de nom dans le laboratoire qu'il a participé à faire tomber.
Il n'est même pas certain d'avoir toujours échangé avec le même individu tout au long de leur collaboration, même si aucune indication du contraire ne lui a jamais été donnée. Il avait indubitablement une équipe au bout du fil, mais il semblerait logique qu'un seul de ses membres se soit directement adressé à lui. En matière de tournures de phrases, ça semble cohérent. Il serait bien incapable de dire si c'est la même personne qui lui parle aujourd'hui, cependant.
Docteur Vurt. J'ai fondé DG laboratories, se présente enfin l'intrus.
Le fondateur de DG est en prison. Et il n'a pas les compétences pour tenir cette conversation même si ce n'était pas le cas, réplique Aleksander, pas tout à fait convaincu par cette annonce.
Ils ne peuvent pas lui avoir menti sur leurs qualifications pendant leurs échanges officiels, car sinon ils n'auraient pas eu besoin d'envoyer leurs gorilles chez lui lorsqu'ils l'ont suspecté de détenir des informations compromettantes à leur sujet. Cependant, cette fenêtre est bien apparue de nulle part sur son outil de travail et a donc forcément demandé un niveau en informatique élevé. Qui que ce Docteur Vurt soit, il en sait peut-être beaucoup sur DeinoGene, mais il serait surprenant qu'il ait été dans leur rang avant leur chute, sans quoi il aurait tenté de les aider.
Vous n'avez pas idée de ce dont je suis capable, Vurt décide d'entretenir le mystère, sinistre.
Je sais que vous cautionnez l'expérimentation sur des sujets humains non volontaires, renvoie Alek, provocateur, lui.
Je suis une personne de science, tout comme vous. Repousser les limites est notre responsabilité, j'aurais pensé que vous en auriez conscience. Mais qu'importe, vous n'êtes pas le premier que je surestime, ose se défendre l'inconnu, pensant sans doute l'insulter.
Vous et moi avons des définitions très différentes de la science, conclut alors tout simplement l'ingénieur, nullement blessé.
Un instant passe encore après qu'il a envoyé ce message, puis la fenêtre disparaît tout aussi brusquement et mystérieusement qu'elle est apparue. Alek reste encore perplexe un instant à l'échange qui vient d'avoir lieu, secoué par les menaces proférées à son encontre et celle de sa famille, avant qu'une nouvelle image, indubitablement en provenance de Caroline cette fois, n'attire son attention. Il s'agit d'un homme brun moustachu, coiffé d'un bandana rougeâtre par-dessus des tresses grossières ornées de perles, qui brandit à bout de bras un gros pot en verre rempli de ce qui semble être du sable. Le large sourire qu'il affiche laisse aisément deviner la signification du message qu'essaye de faire passer l'adolescente : je l'ai trouvé. L'ingénieur se détend un peu, comprenant que son problème ne va pas en rester un bien longtemps.
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