1x12 - Grandes respirations (2/16) - Place nette

Le nez plongé dans un bon polar, Caesar attend dans un couloir de pouvoir entrer en cours de Physique-Chimie. Il avait l'habitude de lire, avant que Jack ne prenne la décision unilatérale de le suivre et lui faire la conversation à chaque instant, en Septembre dernier. Puisqu'il n'a pas adressé la parole au petit blond depuis qu'il lui a mis son poing dans la figure, la semaine dernière, il a ainsi petit à petit retrouvé cette manie des années précédentes, entre autres. C'était étrange, au début, mais il n'a pas tardé à se rendre compte que sa vieille routine lui avait manqué.

Un pied relevé contre le mur auquel il est adossé, le grand brun fait régulièrement tourner les pages de son roman sur la tablette qu'il a entre les mains. Certaines personnes préfèrent un texte qui défile verticalement sans interruption, mais il n'est pas de celles-ci, plus rétro dans son approche.

- Hey, une voix lui fait soudain quitter sa lecture des yeux.

Caesar lève lentement la tête vers Jack, qui se tient devant lui, l'air aussi embêté qu'il en est capable, c'est-à-dire à peine. Le grand brun avise également, du coin de l'œil, son garde du corps, au bout du couloir, qui les surveille d'un air méfiant. Sans doute celui qui était chargé de veiller sur le fils d'ambassadeurs il y a huit jours n'a-t-il pas été très content que son protégé se fasse frapper sans qu'il n'ait le temps d'intervenir, même par un ami qui ne l'a jamais mis en réel danger, et a-t-il fait passer le mot de se montrer vigilant à son égard.

- Waw. Tu as tenu une semaine avant de complètement ignorer ce que j'ai dit. C'est supposé m'impressionner ? raille le lecteur, avec une froideur qu'il ne se connaissait pas lui-même.

Il lui a effectivement dit qu'il en avait fini avec lui. Et jusqu'ici, le blondinet avait eu la bienséance de le prendre au pied de la lettre et le laisser tranquille. Très franchement, Caes s'était attendu à ce qu'il cherche à négocier, comme toujours, veuille se justifier, mais il n'a rien tenté de tel. Peut-être la violence physique est-elle le seul langage qu'il comprenne réellement, en fin de compte, pour tous ces dialectes dans lesquels il est bilingue.

- Je voulais juste te dire que rien ne s'était passé, annonce le surdoué, sans relever le sarcasme, auquel il est toujours aussi imperméable.

Avoir une personne pour qui il fait des efforts ne le rend pas plus vulnérable sur ce plan, curieusement.

- De quoi tu parles ? ne comprend pas l'autre, retenant un soupir las en anticipation de la réponse alambiquée qu'il va sans doute recevoir.

- Notre petit accroc de Lundi dernier n'apparaîtra pas dans ton dossier. Je me suis occupé de détruire les preuves, reformule Jack, toujours sans émotion, ni dans sa voix ni sur son visage.

- Quoi ?! le grand brun manque alors de s'étouffer, laissant la tablette entre ses mains descendre jusque contre la cuisse de sa jambe tendue.

- Je voulais pas être la raison pour laquelle ton dossier serait moins que parfait. Tu ne veux rien avoir à faire avec moi, j'ai saisi le message. Donc j'ai fait effacer les vidéos de ce midi-là. Et le rapport d'incident d'Uglow. Et j'ai aussi fait en sorte que ça ne paraisse jamais dans le Paw Print. Tu vas pas avoir d'ennuis à cause de moi. Plus jamais, continue d'élaborer le blondinet avec une placidité extrême.

- Tu te payes ma tête ? s'exclame Caesar en le dévisageant, se demandant vraiment s'il est sérieux.

- Non, confirme l'autre sans sourciller.

- Va-t'en, lui ordonne alors immédiatement son ancien camarade, serrant les poings et la mâchoire, son regard lançant dans un premier temps des éclairs avant de se perdre dans le vide.

Jack plisse brièvement les yeux, surpris de cette réaction, mais prend une fois de plus sur lui pour ne pas plaider sa cause. Sans rien ajouter, il recule donc de quelques pas avant de se détourner complètement et aller attendre l'arrivée de leur professeur un peu plus loin dans le couloir.

Pendant un court instant, Caesar se demande s'il n'a pas fait tout ça pour se venger de l'affront qu'il lui a fait subir en le mettant au tapis devant une grosse moitié du lycée. Il aurait effacé toute trace de leur relation comme pour lui prouver qu'il n'est rien sans lui, pour lui faire cruellement sentir à quel point son absence le réduit à l'état d'insignifiance qu'il occupait avant de le rencontrer. Mais même si le génie est indubitablement capable de machiavélisme, le seul ami qu'il a jamais eu doute qu'il puisse l'être à ce point. Pas envers lui, curieusement, même après ce qu'il lui a dit et fait. Il a sans doute sincèrement cru bien faire, lui rendre service en lui évitant des ennuis.

Secouant la tête au degré de son erreur, Caesar range son livre dans son sac, incapable de continuer sa lecture maintenant, trop perturbé par ce qu'il vient d'apprendre.

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