1x03 - L'air de rien (3/16) - Suspicions

La veille, une semaine jour pour jour après l'annonce de la collaboration, Aleksander a établi le premier contact avec ses nouveaux associés. Pour une question d'anonymat, d'une équipe comme de l'autre, tous les échanges se sont faits par messagerie instantanée, par l'intermédiaire d'une chaîne relais sécurisée mise en place par l'ingénieur lui-même. Le professeur n'a cependant rien remarqué d'étrange chez le biologiste avec qui il a parlé, au contraire étonnamment supportable, par rapport à ses expériences passées avec des chercheurs du même domaine.

Par acquit de conscience, suite à l'intrusion de la semaine précédente, Alek avait tout de même demandé à TOBIAS de lui faire un rapport de tout ce qu'il serait capable de trouver chez leurs nouveaux collègues sans se faire remarquer. L'un des avantages d'avoir établi la communication lui-même est en effet de maîtriser la transmission de données. Il n'en est pas fier, mais il avait besoin de ça pour se tranquilliser.

Le quadragénaire est encore en train d'étudier le matériel de recherches que ses nouveaux collègues lui ont envoyé le matin précédent, lorsqu'un rapport surgit dans un coin de son immense écran, annonçant que l'IA a terminé sa tâche. Après l'avoir fait venir à lui du geste, Alek survole le compte rendu avec attention. Il semble cependant mitigé quant à ce qu'il y apprend.

— Ça n'a pas de sens, il murmure dans sa barbe, avec un geste machinal pour remonter les manches de sa chemise, pourtant déjà à ses coudes.

La quantité d'informations récoltée n'est en effet, comme l'avait soupçonné son frère, pas cohérente avec un laboratoire qualifié pour franchir ses propres défenses. TOBIAS a pratiquement eu accès à toutes les dossiers conservés par le labo sans aucune résistance. Et il n'est qu'une machine ; à la main, Aleksander n'aurait sans doute eu aucun mal à récolter encore plus de données. Il n'est pas en train de penser qu'un partenaire de l'armée est vulnérable, mais il a confirmation qu'ils ont grand besoin de lui pour leur projet.

Finalement peu intéressé par le contenu des recherches de ses nouveaux partenaires, le père de famille se tourne vers le chemin effectué par son intelligence artificielle. Elle a quand même mis une journée à faire son rapport, ce qui n'est pas négligeable, même avec tout ce qu'elle a ramené, et même pour une tâche à effectuer en toute discrétion.

Ayant, comme le dicte son programme, cherché tous les recoins du système et testé toutes ses limites, TOBIAS a reconstitué un schéma assez complet de la structure cible. Il semblerait que le laboratoire de biologie partage un bâtiment avec d'autres, spécialisés dans d'autres domaines, tout comme celui d'Aleksander. La piste s'arrête là, la compartimentation des systèmes une mesure de sécurité de base, afin de limiter les ravages d'une intrusion éventuelle. Et l'IA n'est pas été conçue pour être capable de contourner toute seule ce type de défenses.

Peut-être ses nouveaux partenaires ont-ils mandaté l'un de ces labos adjacents pour une mission de reconnaissance chez Alek. Ou peut-être que les voisins ont pris la décision d'eux-mêmes, pour leur propre sécurité, en voyant leurs colocataires obtenir une nouvelle collaboration. La seconde hypothèse semble cependant moins plausible, le partenariat gardé soigneusement analogue jusqu'à hier encore.

Dans les deux cas, cela impliquerait que ses interlocuteurs en sachent plus sur Alek que lui n'en sait sur eux. Et surtout plus qu'ils ne le lui laissent croire. Ce qui n'est pas rassurant.

Mais l'alternative, encore une fois, serait une coïncidence entre la réception d'un paquet de feuilles manuscrites et une attaque sur son système. Deux évènements qui ne se sont pas produits depuis si longtemps que l'ingénieur ne saurait affirmer avec certitude qu'ils sont effectivement déjà survenus.

Avec un soupir, Aleksander remercie TOBIAS, et met son rapport de côté, afin de reprendre sa lecture du contenu qu'il a été chargé d'étudier dans le cadre de sa nouvelle collaboration.

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