1x02 - Deux temps, trois mouvements (14/15) - Les temps changent
Markus et Robert arrivent devant Walter Payton High avec la nostalgie inscrite sur leur visage. Les mains dans les poches de leurs vestes respectives, ils se remémorent chacun leurs passages dans cette rue, avec le sourire. L'idée de ce petit détour leur est venue tout naturellement en sortant de cours le soir, des suites de leur conversation du matin. Ils ont passé plus de temps ensemble ici que nulle part ailleurs. S'ils ont un jour eu quelque chose se rapprochant de près ou de loin d'un 'groove', c'était sûrement là. Et dans le pire des cas, ça ne fait jamais de mal de se rappeler les bons vieux jours.
— Mec, ça fait mille ans que je ne suis pas revenu ici, s'exclame Rob, regardant la façade comme s'il s'était préparé à ne jamais la revoir de sa vie.
— Quatre et demi, ça suffira, le tempère son compagnon, le prenant par l'épaule.
Lorsqu'on y est, on ne s'attend pas forcément à ce que les souvenirs de lycée soient aussi bons. Les deux compères ont mis au point d'épiques bêtises, en leur temps. Robert en particulier était créatif et motivé, mais Markus était toujours d'attaque pour l'aider à mener ses plans à bien. Il se désole d'ailleurs parfois qu'aucun de ses cadets n'ait eu l'occasion de le voir en action, puisque Caesar est entré au lycée l'année où lui l'a quitté.
— Ça a l'air plus petit, continue Rob dans ses clichés.
Markus éclate de rire, et entraîne son pote jusqu'à une barrière, sur laquelle ils viennent tous les deux s'adosser. Ils contemplent en silence leur ancien établissement, pour le moment inerte. Ils n'ont cependant pas longtemps à attendre avant que la dernière sonnerie de la journée ne retentisse, et qu'un flot d'élèves commence à sortir par les deux issues disponibles.
Parmi les adolescents apparaît bientôt une tête blonde, entourée d'une tête de jais plus haute, et d'une tête châtain plus basse. Ellen et Nelson laissent Mae à l'entrée, leur arrêt de bus dans une direction opposée du sien. Elle va pour rejoindre l'abri en question lorsqu'elle remarque Robert qui lui fait de grands signes.
— Salut, Mae ! il l'accueille lorsqu'elle se dirige vers eux, après un moment de confusion.
— Salut, Rob. Markus. Qu'est-ce que vous faites là ? elle demande, surprise de les trouver là.
Et pour causes, puisqu'ils ne passent jamais sans une excellente raison. La dernière fois qu'elle les a vus dans l'enceinte, c'était pour la journée des métiers. Ce qui signifie d'ailleurs que les deux jeunes hommes sont passés par ici après avoir obtenu leur diplôme, mais sans doute estiment-ils que ça ne compte pas.
— Est-ce qu'il m'est interdit de passer prendre ma petite sœur à la sortie des cours, de temps en temps ? se défend Mark, croisant les bras.
— T'as pas de voiture, elle proteste tout simplement, comme si ça relevait de l'évidence.
Alors que son aîné est offusqué par son manque de foi en lui, Robert explose de rire. Il n'a pas de frère ni de sœur, et est donc toujours excellent public lorsqu'il est question des facéties familiales des Quanto, même si elles sont somme toute banales. Son hilarité tire un petit air fier à Maena.
— On a juste été pris d'un élan de nostalgie, c'est tout, Rob explique après avoir retrouvé sous sérieux.
Il a bien été obligé, le regard atterré de son meilleur ami l'intimidant un brin.
— Mais puisqu'on était dans les parages, on s'est dit qu'on allait attendre pour pouvoir vous raccompagner, complète Markus, tenant à son honneur.
— Cool. Caes ne devrait pas tarder.
Quand on parle du loup, on en voit la queue, et Caesar fait effectivement son apparition à son tour, par l'autre sortie cependant. L'adolescent fait preuve de la même surprise que sa sœur lorsqu'il repère son frère aîné et son fidèle acolyte. Il marque un temps d'arrêt avant de rejoindre le petit groupe.
— Qu'est-ce que tu t'es fait ? s'inquiète Markus avant que Caesar n'ait le temps de le saluer ou l'interroger sur sa présence.
La question porte évidemment sur la main du jeune homme, en évidence sur la sangle de son sac, et arborant toujours le large pansement appliqué par l'infirmier au matin. Caesar avait presque oublié sa blessure, et la dissimule promptement dans la poche de sa veste.
— Rien de grave.
Le frère aîné accepte cette réponse, mais vient tout de même embroussailler les cheveux de son petit frère pour gentiment le punir de son approximation. Caes dégage sa tête juste à temps, sans mal grâce à ses centimètres de plus.
Alors que le petit groupe se prépare à prendre le chemin du retour, Rob et Markus se détachant de la barrière sur laquelle ils étaient appuyés, le démarrage d'une moto leur fait tourner la tête.
Sur l'engin, Mae reconnaît le mécanicien que lui a montré Ellen le matin-même. Derrière lui, Caesar reconnaît quant à lui la femme blonde de la cantine, sur laquelle Jack était à deux doigts de baver. Sans casque ni l'un ni l'autre, et lui toujours sans blouson, le duo s'éloigne rapidement sur le boulevard, laissant planté là nul autre que Strauss, qui les suit un instant des yeux avant de partir dans une autre direction, à pied.
— Belle bécane ! commente Robert, impressionné sans pour autant être connaisseur.
— Huh. On dirait qu'il a réussi à la réparer, observe l'adolescente.
— Tu connais ce type ? J'ai vu sa passagère à la cantine, ce midi, mais je crois pas que ce soit une prof, l'interroge Caesar.
— Je l'ai juste vu en train de bricoler sa moto ce matin. Mais le type en costume avec qui ils parlaient, c'est Strauss, mon nouveau prof de Maths, tu sais, elle lui offre le peu d'informations qu'elle détient.
— ÇA, c'est un prof ? s'écrie alors Rob, abasourdi, sans doute par l'incohérence entre l'image qu'il a d'un professeur de Mathématiques et la dégaine du grand brun.
— Oui. Il remplace Mrs. Hemmerson, confirme Mae en hochant la tête.
— Quoi ?! C'est tellement injuste, que les générations ultérieures réalisent nos rêves ! continue de s'offusquer Robert, sous le sourire amusé de Mark, qui avait déjà connaissance de la situation.
— Il est plutôt cool, c'est vrai, lui accorde la petite blonde.
— C'est pas le mot que tu as utilisé la dernière fois que tu me l'as décrit, relève Caesar, récoltant immédiatement un regard noir.
Maena lui donne ensuite un coup de coude, tandis qu'il sourit dans son absence de barbe. Mark plisse les yeux mais ne cherche pas à comprendre, laissant ses cadets avoir leurs connivences privées.
La distraction passée, la petite bande reprend sa route, en même temps qu'un mystérieux homme à la peau sombre et aux cheveux ras, perdu dans la masse des élèves qui peuplent l'entrée de l'établissement à cette heure de la journée. Après avoir toisé la foule d'un air insatisfait, adossé à un arbre à côté de la grille qui mène au terrain de baseball, l'inconnu en veste de sport prend la même direction qu'Ellen et Nelson un peu plus tôt, rabattant sa capuche sur sa tête.
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